L’alliance entre champignons et plantes est tellement étroite que les chercheurs définissent aujourd’hui la mycorhize comme un nouvel organe dans le sol. Sans elle, la planète serait dépourvue de l’essentiel de sa végétation terrestre.

Daniel Wipf est professeur de biologie et de physiologie végétale à l’université de Bourgogne. Il est responsable de l’équipe de recherche « Santé des plantes : mycorhizes et défenses » de l’Unité mixte de recherche agroécologie, sous la tutelle de l’Institut national de la recherche agronomique, d’Agrosup Dijon et de l’université de Bourgogne. C’est plus simplement le spécialiste des mycorhizes à arbuscules, depuis l’étude des aspects fondamentaux à l’échelle cellulaire jusqu’aux applications en agroécologie. Dans un instant, vous découvrirez ce que sont ces mycorhizes à arbuscules et leur impact en culture. Mais avant tout, un rappel étymologique : mycorhize vient du grec : mykès (« champignon ») et rhiza (« racine »). Il est évident, à ce stade, qu’il s’agit d’un phénomène qui se passe sous nos pieds, dans le sol. Là où cela se complique un peu, c’est quand on définit la mycorhize comme un organe. « En effet, ce n’est ni le champignon ni la racine, mais bel et bien l’association des deux. Ce que l’on définit par symbiose mutualiste », explique notre chercheur, qui ajoute aussitôt que le terme « symbiose » est ici utilisé dans son sens littéral : vivre ensemble ; « mutualiste » indiquant la notion de bénéfice mutuel. Nous y voilà. Nos deux partenaires sont unis pour le meilleur, et parfois pour le pire.

Les mycorhizes présentent différentes formes

Les plus anecdotiques sont l’endomycorhize des orchidées, mycorhize orchidoïde, celle des éricacées, la forme ericoïde, et enfin la mycorhize arbutoïde. Les deux derniers types d’association symbiotique sont les plus répandus : le premier, l’ectomycorhize, concerne 5 % des plantes terrestres (uniquement des arbres résineux et feuillus des forêts de l’hémisphère Nord) et les fructifications de nombreux champignons (truffe, chanterelle, etc.). Le second, l’endomycorhize à arbuscules, est la forme la plus ancienne et la plus étendue, puisqu’elle concerne 80 % des plantes terrestres (des mousses aux arbres feuillus), et seulement deux cent cinquante espèces de champignons, appelés gloméromycètes.
« Endo- » et « ecto- », préfixes utilisés précédemment, distinguent leur « liaison ». Dans tous les cas, le champignon pénètre la racine de la plante. Côté endomycorhize, il entre dans les cellules corticales de la racine, alors que pour l’ectomycorhize, il se contente de rester à l’extérieur desdites cellules. Bon, pour simplifier, on ne parlera pas d’un troisième mode opératoire : l’ectendomycorhize.

Concentrons-nous sur l’endomycorhize à arbuscules qui lie ces gloméromycètes, incapables de vivre sans les plantes, à la majorité des végétaux depuis leur apparition sur Terre ! « Cette mycorhize est en effet née il y a 400 à 450 millions d’années, à l’ordovicien, au moment où les plantes sont sorties de l’eau ! Celles-ci ont réussi à coloniser la Terre en s’associant aux champignons, qui leur ont servi de “racines” dans un premier temps. Car dans l’eau, les plantes n’en avaient pas besoin. Les alliances entre plantes et champignons sont donc très anciennes. Autant dire que la question est complexe », s’amuse Daniel Wipf. Ces interactions vertueuses, qui favorisent entre autres la nutrition des plantes, la résistance au stress ou la stabilisation des sols, sont utilisées en culture.

La mycorhize est l’alliance entre la racine et le champignon

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