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Jardin bio-aromatique deJalil Belkame. Garden_Lab 11, Paysages Olfactifs.

Jalil Belkamel
«On a perdu le sens de l’olfaction»

Jalil Belkamel dans son jardin bio-aromatique Garden_Lab 11, Paysages Olfactifs.

Au pied du Haut Atlas, à 35 km au sud-est de Marrakech, Jalil Belkamel s’emploie depuis trente ans à réconcilier les visiteurs de son jardin bio-aromatique avec leur odorat grâce aux plantes.

« On dit : “j’ai regardé un tableau, vu un joli paysage, écouté une belle musique, goûté un bon plat”, mais rarement “j’ai senti une odeur incroyable” », déplore Jalil Belkamel, phyto-aromathérapeute, professeur universitaire et conférencier. Avec son frère Abdelfattah, docteur en pharmacie, ils ont créé à la fin des années 1990 le jardin bio-aromatique d’Ourika, unique en son genre au Maroc, dans le but de rééduquer le visiteur à la connaissance du monde végétal et à ses multiples bienfaits. « Des gens qui reconnaissent l’odeur de la rose “chimique” n’identifient plus celle de l’huile essentielle naturelle ! note le professeur. Cette ignorance olfactive est dramatique, tant d’un point de vue culturel que sur le plan de la santé. »

L’OLFACTION N’EST PAS QU’UNE SENSATION

L’odorat est le sens qui permet d’analyser les substances chimiques volatiles (odeurs) présentes dans l’air. Certes, mais, l’olfaction n’est pas qu’une sensation, tient à rectifier Jalil Belkamel : « Ce
sens doit également être remis à l’honneur pour
ses effets bénéfiques. Les odeurs ont un rôle dans l’assainissement de l’air et sont importantes pour notre équilibre global. » Il est urgent, selon lui, de s’extraire des émanations artificielles diffusées par les pots d’échappement ou dans des milieux clos, afin de « sentir des choses utiles pour notre santé. Les parfums, souvent synthétiques, sont les rares repères olfactifs dans notre environnement actuel. Ce sont les étalons du bon ou du mauvais. D’ailleurs, ne réagit-on pas par un péremptoire “j’aime” ou “je n’aime pas” en présence d’odeurs ou de parfums ? On s’identifie aux parfums industriels, enfin, au marketing qui les entoure. Ces parfums sont bourrés de substances sans intérêt pour le cerveau ! ».

Jalil Belkamel commence ses séances olfactives en rappelant à chacun de prendre son temps.
Le jugement est banni d’entrée de jeu car, selon l’aromathérapeute, il empêche de sentir et d’analyser ce que les odeurs procurent. « Avant tout, explique-t-il, pour bien sentir, il faut se tenir droit, ne pas baisser la tête, et fermer les yeux si possible, car la vision parasite la concentration. Ensuite on place le produit à sentir à 1 cm sous
le nez, et on le fait voyager entre les deux narines : en effet, celles-ci ne fonctionnent pas simultanément de la même manière. Toutes les quatre-vingt-dix secondes, l’une des deux est plus “réceptive”. Il faut donc se donner le temps de sentir. En aromathérapie, je conseille de prendre une mouillette et de la conserver une demi-heure sous le nez pour en éprouver l’effet. C’est magique alors de constater que la majorité du groupe exprime la même chose. Les huiles essentielles sont aujourd’hui utilisées dans le domaine de la psychiatrie pour remonter dans le temps, pour retrouver des souvenirs très anciens. Un peu à la manière de l’hypnose. » Dans le jardin d’Ourika, marjolaine, menthe, thym, citronnelle
et de nombreuses autres plantes aromatiques sont cultivées afin d’alimenter les ateliers pédagogiques, mais également pour fabriquer des huiles essentielles et des tisanes. Le site est en outre un terrain de recherche et d’expérimentation grandeur nature pour les deux frères spécialistes, en lien avec l’université de Marrakech et des laboratoires français. On y acclimate de nouvelles plantes. On cherche également à définir les meilleures périodes de cueillette selon les besoins. « On cueille souvent les plantes au moment de la floraison, détaille Jalil Belkamel. S’il est vrai qu’elles sont alors gorgées d’huiles essentielles, les principes actifs recherchés n’ont pas nécessairement atteint leur concentration optimale. Lorsque je souhaite confectionner une huile de massage, par exemple, je sélectionne une molécule bien précise, qui n’est pas forcément présente au moment de la floraison. »

REDONNER LE « GOÛT » DU VÉGÉTAL

Cependant, la mission première du jardin reste pédagogique. Elle vise à redonner au visiteur le
« goût » du végétal et de la nature, dans un pays
à la flore exceptionnelle, où l’utilisation des vertus des plantes aromatiques fait partie des traditions. Quatre mille deux cents espèces de plantes aromatiques et médicinales sont recensées au Maroc, dont un grand nombre sont endémiques.
La seule région de l’Ourika compte quatre-vingts plantes qui ne poussent nulle part ailleurs. De l’avis de Jalil Belkamel, la connaissance botanique et l’utilisation des plantes pour se soigner sont tombées dans l’oubli avec la généralisation
du mode de vie urbain. « Les gens sont tellement pressés aujourd’hui qu’ils zappent la nature et s’en éloignent. Ils traversent la vie. Ils ont pourtant besoin de se poser, de déguster la nature ! » affirme- t-il. C’est pourquoi, avec son frère, ils entendent sensibiliser à la phytothérapie un vaste public, composé aussi bien d’agriculteurs, d’étudiants que d’habitants. Ici, on se balade pieds nus, parfois
les yeux bandés pour retrouver les sensations perdues. « Nous espérons par cette démarche contribuer à la revalorisation de la plante au Maroc. L’éducation de l’odorat vaut autant pour les adultes que pour les enfants. Je remarque que si les visiteurs du jardin parviennent facilement à reconnaître visuellement la plante, ils n’ont pas le réflexe de venir la toucher, et encore moins de la sentir. Il est toutefois primordial d’avoir ce contact sensoriel, de profiter de toute chose pour aller sentir, sans se presser. J’insiste toujours sur le fait qu’avec le nez, nous pouvons faire des choses très utiles. »

Et notre spécialiste de l’aromathérapie de conclure sur un constat et une injonction à nous reconnecter à nos sens : « L’olfaction est un sens complètement oublié, inconsciemment certes. Or, nous savons que 70 % des personnes anosmiques, qui ont perdu l’odorat, sont dépressives. C’est
 dire l’importance de ce sens dans notre équilibre psychique et émotionnel. »

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Cet article est extrait du onzième opus de la revue Garden_Lab : Paysages olfactifs.
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